
Un OUI à l’initiative « Zéro pertes » plus que nécessaire
Par Alfonso Gomez, Conseiller administratif en Ville de Genève. Texte paru sur son blog de la TdG, le 7 septembre 2020.
Au printemps 2018, dans le cadre du débat sur la troisième réforme de l’imposition des entreprises, les Verts, Ensemble à Gauche, le Parti socialiste et la Communauté genevoise d’action syndicale (CGAS) ont lancé ensemble l’initiative 172 « Zéro pertes : Garantir les ressources publiques, les prestations et la création d’emplois ». Son objectif est clair. Il s’agit de fixer un cadre constitutionnel aux réformes fiscales fédérales à venir, en inscrivant plusieurs principes clés dans la constitution genevoise : la lutte contre la concurrence fiscale intercantonale, la préservation du financement des services publics et des prestations à la population, le maintien du niveau des recettes fiscales et le renforcement de la progressivité de l’impôt. Un texte fort, essentiel même, que je défends avec conviction.
Depuis 25 ans, les réformes fiscales successives ont très majoritairement bénéficié aux plus privilégié-e-s et aux grandes entreprises, alors même qu’ils accumulaient déjà une part croissante des richesses disponibles : baisse de 12% de l’imposition en 1999, qui a essentiellement profité aux très hauts revenus, suppression de la taxation des donations et successions en ligne directe en 2004, qui a avant tout favorisé les super-riches, bouclier fiscal en faveur des multimillionnaires en 2009 et baisse massive de l’imposition des bénéfices des grandes entreprises en 2020. Cumulées, ces réformes ont créé un manque à gagner qui dépasse aujourd’hui plus d’un milliard de francs par an pour l’Etat de Genève. C’est autant de mesures d’économies anti-sociales et de coupes dans les prestations à la population qui ont été réalisées. C’est autant de ressources qui nous manquent aujourd’hui pour faire face à la crise sociale, à la pandémie, à l’urgence climatique et à la transition écologique.
Dans le même temps, nous avons assisté à une accélération du processus de concentration des richesses dans notre canton et à un creusement des inégalités. Aujourd’hui, 80% de la fortune totale se concentre ainsi dans les mains de 5% des contribuables, tandis qu’une partie toujours croissante de la population genevoise se paupérise. Une situation encore aggravée par les conséquences de la crise sanitaire, comme l’illustre notamment la demande toujours très soutenue en matière de distributions alimentaires.
La crise que nous traversons rappelle l’importance vitale des services publics et des moyens dont ils disposent. Pour assurer ses prestations, répondre à l’urgence sociale et climatique, relancer l’économie, l’Etat doit pouvoir bénéficier de moyens suffisants. C’est tout le sens de l’initiative dite « Zéro pertes », qui vise à placer la justice fiscale et le maintien des prestations à la population comme des prérequis à toutes les réformes fiscales à venir. Et ce faisant, de réaffirmer avec force la primauté des intérêts des Genevoises et Genevois sur les stratégies qui ne bénéficient qu’à une infime minorité.