Matthias Erhardt

Exposé des motifs

La durabilité est un principe qui existe depuis plus de 300 ans. En 1713, l’administrateur royal saxe Hans Carl von Carlowitz publie un traité sur l’économie forestière. Dans cet ouvrage, l’auteur propose une utilisation « constante et durable » de la ressource que représente la forêt. En 1972, le Club de Rome publie le rapport Meadows, intitulé « Les limites à la croissance » qui démontre de manière impressionnante et chiffrée que les ressources naturelles de notre planète sont limitées et que notre avenir dépend d’une réduction drastique de notre consommation de celles-ci.

La notion de durabilité est progressivement précisée et adoptée au sein des Organisations Internationales. Le développement durable est d’abord défini comme « un mode de développement qui répond aux besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs » (Rapport Bruntland, 1987). En 2015, alors que les États membres de l’ONU adoptent l’Agenda 2030, ils définissent les 17 objectifs du développement durable (ODD) et ses 169 cibles, qui forment encore aujourd’hui le cadre de l’action internationale en faveur du développement durable tant dans les pays industrialisés que dans les pays en développement.

La Suisse, et particulièrement le Canton et la Ville de Genève deviennent rapidement précurseurs pour l’intégration du développement durable dans leurs politiques publiques et leurs législations. La mise en place d’une stratégie climat par le Conseil administratif intègre les notions de justice sociale et environnementale à l’ensemble des politiques publiques. Les services de l’administration municipale agissent en faveur du développement durable notamment au travers les actions du service Agenda 21 – Ville durable. Le Conseil administratif a également instauré une charte de l’alimentation durable dans les institutions municipales et dans les marchés publics de restauration.
Le levier économique est indispensable et puissant pour opérer des changements . Pour les municipalités, il s’agit principalement des investissements, des marchés publics et des subventions.

Concernant ces dernières, il existe à Genève des services et des fonds qui appuient et financent la création de projets axés spécifiquement sur la durabilité, notamment le programme G’innove ou les subventions ponctuelles accordées par le service Agenda 21, dont le « Fonds climat ». Néanmoins, pour atteindre les objectifs d’ici à 2030, il ne suffit pas d’encourager et de financer de nouvelles pratiques plus respectueuses, mais il est nécessaire de poursuivre l’intégration des objectifs de développement durable par l’ensemble des organismes subventionnés.

Le Règlement régissant les conditions d’octroi des subventions municipales (LC 21 195) et son annexe prévoient déjà des exigences en termes de devoir d’information, de transparence comptable et financière, avec une obligation de rendre compte de la bonne utilisation des deniers publics . Le respect de ces exigences est contrôlé. En revanche, les aspects de durabilité sociale et environnementale ne sont ni formalisés ni systématiquement évalués pour mesurer l’impact des activités des organismes et projets subventionnés.

Motion

  • L’urgence climatique décrétée en Ville de Genève et la stratégie climat mise en œuvre sur le territoire ;
  • La forte adhésion de principe, par les collectivités publiques suisses mais aussi par les entreprises, à la nécessité d’encourager un développement durable, qui soit efficient économiquement, juste socialement, et qui aura le moins d’impact possible sur notre environnement ;
  • L’application faite au sein du Canton et de la Ville de Genève, à travers la création d’un cadre législatif et de mesures incitatives ;
  • La part de plus de 20% du budget 2023 de la Ville, soit plus de 280 millions de francs que représentent les subventions monétaires municipales ;
  • L’impact important sur le plan environnemental que peuvent avoir certaines activités subventionnées, comme dans les domaines sportif, culturel, social ou patrimonial, notamment dans leurs politique d’achat, les déplacements, et l’organisation de manifestations d’envergure ;
  • Les exigences existantes en matière de transparence et d’efficacité économique dans le règlement régissant les conditions d’octroi des subventions municipales (LC 21 195) ;
  • La nécessité d’encourager le changement de manière transversale, afin que tous les acteurs-rices et organismes entrent conjointement dans une économie circulaire et durable et que les stratégies internationales, nationales, cantonales et municipales puissent être porteuses de changement ;

le Conseil municipal invite le Conseil administratif:

  • à modifier le Règlement régissant les conditions d’octroi des subventions municipales (LC 21 195) de sorte
    •  à y inclure des exigences de durabilité écologique et sociale basées sur les 17 objectifs de développement durable, que les entités subventionnées intègreront tant dans leur fonctionnement interne que dans le déploiement de leurs activités ;
    • à ce que les entités touchant une subvention annuelle de 200’000 francs et plus devront s’engager via une convention de subventionnement prévoyant un mécanisme de reporting ;
    • à ce que les entités touchant une subvention annuelle de moins de 200’000 francs devront s’engager via une charte d’engagement et intégrer un chapitre sur la durabilité dans leurs rapports d’activités.

Sources :

  • La Suisse sur la voie du développement durable, Points de repères, Comité interdépartemental pour le développement durable (CIDD), Berne, 2012.
  • Notre avenir à tous, Commission mondiale sur l’environnement et le développement de l’Organisation des Nations unies, présidée par Gro Harlem Brundtland, 1987
  • Charte d’Aalborg, Conférence européenne sur les villes durables à Aalborg, Danemark, 1994.